Communiqué de Presse du 04/02/2019 (version longue)

Rassemblement à la veille du début du procès des indépendantistes catalans à Madrid

L’association Assemblée nationale catalane[1] en France (ANC France) appelle à un rassemblement dimanche 10 février 2019 sur la place de la République, Paris, à 12 heures. Dans le contexte de la campagne internationale #Makeamove, elle convoque les citoyens à manifester leur soutien aux principes démocratiques, aux droits de l’Homme et au droit à l’autodétermination

Plusieurs membres du gouvernement catalan sont emprisonnés depuis fin 2017b –Oriol Junqueras (vice-président), Raül Romeva, Dolors Bassa, Joaquim Forn, Josep Rull, Jordi Turull (ministres)– ainsi que Carme Forcadell, présidente du parlement catalan, accusés de rébellion et de sédition. Plusieurs associations s’inquiètent du sort des détenus. La Ligue des droits de l’Homme, le 3/11/2017 exprimait des « Inquiétudes démocratiques en Catalogne »[2]. Ces incarcérations avaient fait suite à celles de Jordi Sànchez (président de l’ANC) et de Jordi Cuixart (président d’Omnium Cultural) le 16 octobre 2017.

#Makeamove

L’autodétermination est un droit, non un délit

https://makeamove.cat/

S’étant exprimée sur le cas de MM. Cuixart et Sànchez le 18 octobre 2017, Amnesty international a considéré que l’accusation relative à la rébellion était excessive ainsi que l’emprisonnement sans caution de ces militants qui n’étaient à l’origine d’aucune violence[3]. Veuillez également consulter le site d’EU-Catalonia Dialogue Platform (https://www.eucatplatform.eu/news/) et celui d’Europe écologie-les Verts (https://eelv.fr/liberez-les-prisonniers-politiques-catalans/).

Le Président de la Generalitat, Carles Puigdemont, qui se trouve en Belgique, est également accusé de rébellion et de sédition, de même que les quatre ministres catalans qui l’ont accompagné. Ils ont été menacés d’extradition vers l’État espagnol. Face aux réticences, voire aux rejets  des justices des pays d’accueil, les mandats internationaux ont été finalement retirés.

Les procès des indépendantistes catalans s’ouvrent à Madrid sans que toutes les garanties d’impartialité ne soient réunies. En effet, la faible indépendance de la justice espagnole a déjà été soulignée. De même il importe de rappeler la légitimité de l’indépendantisme et de l’exercice du droit à l’auto-détermination par la tenue d’un référendum (traités internationaux, principes démocratiques, constitution espagnole).

Faible indépendance de la justice espagnole

Des indicateurs internationaux au rouge. Dans le tableau de bord sur la justice publié par la Commission européenne en 2017, l’État espagnol occupe la 25e place sur 27 –Figure 51. Les citoyens de ce pays considèrent ainsi qu’il existerait des interférences entre politique et pouvoir judiciaire.

http://ec.europa.eu/justice/effective-justice/files/justice_scoreboard_2017_en.pdf.

Selon le World Economic Forum, dans The global competitiveness report, l’Espagne se situe à la 58e place sur 137 en termes d’indépendance judiciaire (page 271), derrière l’Azerbaïdjan ou la Chine.

http://www3.weforum.org/docs/GCR2017-2018/05FullReport/TheGlobalCompetitivenessReport2017%E2%80%932018.pdf

De dures critiques de juristes espagnols. Professeur de droit constitutionnel, ancien juriste de la Cour constitutionnelle espagnole, Joaquín Urias avait posté : « L’ordonnance de placement en détention  provoque de la honte. Il semble que nous ayons une décision politique exécutée –de la pire des façons– par un juge. Répression pure ». Voir son analyse complète dans :

http://ctxt.es/es/20171101/Firmas/15959/Audiencia-nacional-Carmen-Lamela-prision-consellers-catalunya-joaquin-urias-ctxt.htm

Voir également Juges pour la Démocratie :

Un article du journal espagnol Público signale dix irrégularités dans les accusations de la justice espagnole à l’encontre des indépendantistes inculpés. Par exemple, l’Audiencia Nacional espagnole envoie en prison des inculpés pour de supposés délits qui ne sont pas de sa compétence.

http://www.publico.es/politica/audiencia-encarcela-govern-10-agujeros-negros-justicia-querellas-prision-independentistas.html

[4]

L’indépendantisme et l’exercice du droit à l’autodétermination par la tenue d’un référendum ne sont pas des délits

L’adaptation des constitutions et cadres légaux. Ces textes peuvent ne pas prévoir la sécession d’un territoire mais des interprétations flexibles sont souvent mises en avant pour pouvoir répondre à la volonté populaire. Cela a été le cas au Canada avec le Québec, en Grande Bretagne avec l’Ecosse. Une commission d’experts a ainsi considéré que « If Spanish national Authorities deny the right to Catalonia to negotiate its Right to Decide within the Spanish political framework, then the only path left for Catalonia’s Authorities is the call for a self-determination referendum »[5].

L’État espagnol et le droit international. Les pactes sur les « Droits civils et politiques et sur les Droits économiques, sociaux et culturels » approuvés par l’Assemblée Générale des Nations Unies le 19 décembre 1966, ratifiés et en vigueur dans le Royaume d’Espagne depuis 1977 reconnaissent le droit des peuples à l’autodétermination comme le premier des droits de l’homme. L’article 1.2 de la Charte des NU et le Statut de la Cour internationale de Justice établissent qu’il convient de susciter entre les nations des relations d’amitié fondées sur le respect du principe d’égalité des droits et de celui relatif à l’autodétermination des peuples.

La Constitution espagnole de 1978 contient ces engagements. Elle détermine dans son article 96 que les traités internationaux ratifiés par l’Espagne font partie de son règlement intérieur tandis que son article 10.2 établit que les normes relatives aux droits fondamentaux et aux libertés publiques seront interprétées d’un commun accord avec les traités internationaux applicables en la matière[6].

Au vu de ces analyses, l’ANC France considère que les procès d’élus et de membres de la société civile catalane sont injustes. Ils dénotent l’interférence du pouvoir politique sur le pouvoir judiciaire ; ils découlent d’une interprétation rigide de la Constitution espagnole en contradiction avec certains de ses articles et la prééminence des principes démocratiques, dont l’autodétermination. Enfin, l’arrestation d’élus et de militants qui n’ont fait que répondre à la volonté populaire de la majorité[7] suppose une grave atteinte aux droits fondamentaux. Il s’agit d’

Un procès contre la démocratie

Un procès contre les droits de l’Homme

Un procès contre le droit à l’autodétermination

TWITTER : www.twitter.com/anc_france

FACEBOOK : www.facebook.com/AssembleeNationaleCatalaneFrance

Web ANC France : www.assemblea.fr


[1]

L’ANC est, avec Omnium, la principale association indépendantiste en Catalogne. Le mouvement est fondé sur la participation et l’organisation citoyennes. Il vise à atteindre ses objectifs par une voie démocratique, pacifique et inclusive. Le mouvement est transversal et pluriel, porté par des citoyens de toutes origines et catégories socioprofessionnelles. https://assemblea.cat/


[2]

https://www.ldh-france.org/inquietudes-democratiques-en-catalogne/


[3]

[https://www.es.amnesty.org/en-que-estamos/noticias/noticia/articulo/amnistia-internacional-considera-excesivos-los-cargos-de-sedicion-contra-jordi-sanchez-y-jordi-cu/


[4]

Adaptation en français dans http://catalanindependance.blog.lemonde.fr/2017/11/04/la-justice-espagnole-face-a-lindependantisme-catalan-dix-grandes-lacunes-juridiques/


[5]

Dans le rapport The Legitimacy of Catalonia’s Exercice of its Right to Decide rédigé par les professeurs Nicolas Levrat, Université de Genève, Sandrina Antunes, Universidade do Minho, Guillaume Tusseau, Sciences Po-Paris, Paul Williams, American University, Washington DC.

https://www.unige.ch/gsi/files/9115/0461/7417/EXECUTIVE_SUMMARY_Catalogne.pdf


[6]

Article 10.2. Les normes relatives aux droits fondamentaux et aux libertés que reconnaît la Constitution seront interprétées conformément à la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme et aux traités et accords internationaux portant sur les mêmes matières ratifiés par l’Espagne. Article 96.1. Les traités internationaux régulièrement conclus et une fois publiés officiellement en Espagne feront partie de l’ordre juridique interne. Leurs dispositions ne pourront être abrogées, modifiées ou suspendues que sous la forme prévue dans les traités eux-mêmes ou conformément aux normes générales du droit international. http://www.congreso.es/constitucion/ficheros/c78/cons_fran.pdf


[7]

Lors des élections plébiscitaires du 27 septembre 2015 en Catalogne, les formations indépendantistes ont recueilli 48% des suffrages face à 39% de voix destinées aux partis unionistes –le reste ne s’est pas prononcé sur cette question. Lors du référendum du 1er octobre 2017, 90% des votes exprimés étaient favorables à l’indépendance. Si la participation (43%) atteint le niveau très élevé de celle de 2015 (77%) et si toutes les voix supplémentaires (34%) avaient été contraires à l’indépendance, le OUI l’aurait toutefois emporté.